ESPRIT PARA
Parachutiste un jour, Parachutiste toujours
(Texte de Jean Rosier)
C’est un sujet dont on parle beaucoup malgré sa tendance à disparaître ou se modifier, mais peu en connaissent la signification exacte. C’est avant tout un état de solidarité d’un genre fraternel entre les membres d’une corporation différente dans une communauté. Il se manifeste par la matérialisation d’entraide et de soutien en toutes circonstances entre les membres de cette corporation. On peut dire que cet état d’esprit a évolué en trois phases dans le milieu para.
1/ - Génération paras de la France libre
C’était l’époque de la guerre patriotique ou les soldats étaient des engagés. Les théâtres d’opérations avaient lieu entre belligérants de civilisations européennes. Les paras étaient dénommés S.A.S. nom d’appellation anglaise du Spécial Air Service. Unités toutes nouvelles et utilisées suivant des méthodes non conventionnelles, les S.A.S. étaient peu nombreux et subissaient un entraînement lui aussi peu conventionnel. De plus, le fait de franchir la porte d’un avion en vol les faisait considérer comme des casse-cous en leur donnant néanmoins un prestige de courage que le commun des mortels n’avait pas. Ils formaient donc une sorte de caste à part. Par la suite les effectifs paras ayant considérablement augmenté, l’admiration pour ces gens assez fous pour se jeter dans le vide diminua quelque peu avec l’habitude et le nombre de ce qui était considéré au début comme un exploit. Elle fut toutefois remplacée par leurs brillants résultats opérationnels obtenus à la suite de cette formation spéciale à laquelle ils étaient soumis. Actuellement, sauter en parachute est devenu quelconque et n’a plus rien d’exceptionnel. C’est devenu un sport à la mode pratiqué par une nombreuse jeunesse aussi bien garçons que filles.
2/ - Génération paras d’Indochine.
C’est certainement dans la génération paras d’Indochine que l’on trouvera le paroxysme de cet état d’esprit, mais pour des raisons assez différentes. Contrairement à ce que certains historiens prétendent, l’Indochine n’était pas une guerre patriotique. Le jeune engagé partant pour cette lointaine colonie y recherchait surtout l’aventure et l’exotisme mais quelques fois aussi pour certains, la conviction ou l’oubli d’engagements politiques, ce qui dans une unité de commandos parachutistes le rendait très volontaire. Ce fut aussi une campagne où les paras furent le plus utilisés comme parachutistes au sens propre du mot, c’est à dire pour des opérations de combats avec saut en parachute. Super entraînés avant leur départ et expérimentés par leur habitude du terrain, ils étaient intensément utilisés pendant leur séjour. On retrouvait dans ces unités, la même psychologie que chez les S.A.S, mais avec la différence que les théâtres d’opérations étaient entre belligérants de civilisations différentes. D’autre part, isolés et bien loin de leur famille, plus critiqués que soutenus par leur pays; ils se trouvaient seuls et davantage obligés de resserrer les liens entre eux, par nécessités. Les combats, souvent très violents avaient lieu dans une nature sauvage transformant l’évacuation des blessés très problématique. L’hélicoptère n’existant pas encore, il ne fallait donc compter que sur les copains .Tout cela aussi créa un état d’esprit à part que l’on retrouvera d’ailleurs pendant la bataille de Diên Biên Phû quand les paras de réserve, bien que sachant la bataille perdue étaient malgré tout volontaires pour les derniers parachutages “ pour aider les copains “.
Cet état d’esprit était encouragé et partagé à tous grades, l’officier subissant les mêmes épreuves que le simple para. On retrouvera cet encouragement jusque dans certaines devises des unités, exemple la devise des commandos Pontchardier, reprise par le 2° BCCP - S.A.S :
<< A la vie, A la mort >>. Cet état d’esprit fut assez fort pour survivre à la séparation avec l’époque militaire et se retrouve toujours chez ces vétérans qui subirent ensemble les mêmes épreuves.